Holbein propose une gouache de type professionnelle particuliĂšrement plĂ©biscitĂ©e par les artistes anglophones. Elle est un peu moins rĂ©pandue en France mais loin d’ĂȘtre difficile Ă trouver pour autant, et j’ai dĂ©cidĂ© de la tester et de partager mes impressions dans cet article. Comme toujours, je ne vous cache rien, ni le positif, ni le nĂ©gatif.

Gouache Holbein : Fiche d’identitĂ©
- Origine : Japon
- Nuancier : 89 couleurs + 48 nuances « irodori » (couleurs traditionnelles japonaises, 12 par saison)
- Point de vigilance : Existe aussi en version « gouache acrylique » qui ne se rĂ©active pas Ă l’eau
- Mon coffret : 18 tubes de 5ml (attention, 5 ml correspond Ă un tout petit format !) trouvĂ© chez Jackson’s art supplies

PremiĂšres impressions et avis sur les gouaches Holbein
J’ai testĂ© pour la premiĂšre fois ces gouaches avec un direct dans lequel je peignais d’aprĂšs une photo de plage et rochers seychellois. J’ai tout de suite trouvĂ© que la peinture avait une bonne texture, une certaine fluiditĂ© que seuls l’outremer foncĂ© et la terre d’ombre brĂ»lĂ©e prĂ©sentait moins (elles sont un peu plus compactes que les autres).
Rien à signaler pour ce qui est du séchage, des mélanges, de la couvrance sur cet essai. Le rendu est franchement beau, les contrastes sont profonds, les couleurs sont vives.
Cartes nuanciers Holbein : La déconfiture
Je trouve toujours intĂ©ressant de rĂ©fĂ©rencer chaque couleur dont je dispose en rĂ©alisant une carte par couleur. Vous en aviez peut-ĂȘtre aperçu dans l’article dĂ©diĂ© Ă mon avis sur les gouaches Daniel Smith, et les voici Ă nouveau ici. Chaque carte permet de rĂ©fĂ©rencer :
- Le nom de la couleur
- La permanence/résistance à la lumiÚre
- L’opacitĂ©
- Le nombre de pigments différents par tube
- Voir le comportement de la peinture en aplats
- Voir le comportement de la peinture en dilution
- Voir le rendu de la peinture mélangée à du blanc
Une carte, beaucoup d’informations.

A la lumiĂšre de ces rĂ©fĂ©rences, je dois vous avouer que mon avis sur les gouaches Holbein a pris du plomb dans l’aile.
1/ La permanence des gouaches Holbein
Le point le plus nĂ©gatif est celui de la permanence. La permanence est un paramĂštre essentiel pour les artistes, car elle dĂ©termine la durĂ©e de vie optimale d’un tableau une fois qu’il est exposĂ©, c’est Ă dire encadrĂ© et fixĂ© Ă un mur. En effet, la lumiĂšre (mĂȘme sans soleil direct) peut modifier l’aspect des couleurs les plus fragiles, et les tableaux peuvent se retrouver totalement diffĂ©rents, voire avec des zones effacĂ©es.
Sur mon assortiment de 18 tubes, seules 5 couleurs arborent une rĂ©sistance optimale de 4*: Blanc permanent, ocre jaune, terre d’ombre brĂ»lĂ©e, terre de sienne brĂ»lĂ©e, noir d’ivoire. Plusieurs couleurs sont carrĂ©ment fugitives : Orange brillant, violet, magenta.
Et entre les deux, les couleurs restantes sont des 2* ce qui correspond Ă une tenue allant de 5 Ă 10 ans.

Oui. Cela signifie bien que sur 18 tubes, 13 couleurs ne dĂ©passeront pas les 10 ans de conservation une fois exposĂ©es, et perdront leur Ă©clat ou changeront de teinte. C’est vraiment BEAUCOUP pour un assortiment qui se veut professionnel. Certains artistes ont fait des tests Ă leur niveau en exposant leurs couleurs sur une fenĂȘtre pendant plusieurs mois, les rĂ©sultats laissent perplexes.
2/ L’opacitĂ©
Les gouaches Holbein dont je dispose ont une opacitĂ© assez moyenne. Aucune couleur n’arrive Ă recouvrir totalement la ligne noire tracĂ©e au marqueur. J’ai des Daniel Smith et des Schmincke qui y parviennent, mais seulement sur une partie de leur gamme, et il est possible que certaines gouaches Holbein soient plus opaques que celles de mon assortiment.
Les jaunes et les rouges sont les moins opaques, ce qui est toujours le cas quelle que soit la marque.

3/ Le choix des pigments
Le choix des pigments est trĂšs diffĂ©rent des gouaches que j’utilise habituellement. J’aime bien pouvoir comparer un mĂȘme pigment d’une marque Ă l’autre, mais lĂ , beaucoup de pigments utilisĂ©s chez Holbein ne sont pas prĂ©sents parmi les autres marques que j’ai dĂ©jĂ rĂ©fĂ©rencĂ©es. Holbein semble privilĂ©gier les pigments trĂšs vifs, presque fluos, quitte Ă les choisir fugitifs comme le PR9 ou le PO13.

Une chose qui me paraĂźt extrĂȘmement bizarre, c’est le rendu de leurs deux tubes Ă base de violet PV15. Ils l’utilisent seul en magenta, et en addition avec de l’outremer (PB29) pour leur violet. Deux choses ne sont pas logiques :
- Le PV15 est un pigment trĂšs doux, il n’a pas du tout ce rendu saturĂ©.
- C’est aussi un pigment trĂšs stable, dotĂ© d’une excellente rĂ©sistance Ă la lumiĂšre. Celui de Holbein est notĂ© fugitif, avec la pire note possible.
Ma théorie est donc que la marque a ajouté du fluo à ces couleurs. Cela expliquerait à la fois le visuel et la résistance à la lumiÚre altérée.


4/ Le nombre de pigments différents
Concernant le nombre de pigments par tube, 11 couleurs sont monopigmentaires. Certaines couleurs qui le sont habituellent dans les gammes professionnelles ne le sont pas ici, comme l’ocre jaune ou le vert Ă©meraude.
Cependant, dans les couleurs qui sont composĂ©es de plusieurs pigments, il faut noter qu’il s’agit de pigments relativement proches les uns des autres : Cela permet d’obtenir des mĂ©langes qui restent propres.
J’ai Ă©galement constatĂ© que seule une couleur sur 18 avait Ă©tĂ© coupĂ©e au blanc (le « bleu turquoise »), ce qui est trĂšs bon signe car c’est le facteur numĂ©ro 1 des manques de contrastes qui peuvent dĂ©cevoir chez certaines marques.

Autres tests et impressions sur les gouaches Holbein
Poursuivant mes explorations, j’ai rĂ©alisĂ© plusieurs peintures avec ces gouaches afin de tester plus amplement leur comportement (elles servent d’illustration Ă cet article).
Et c’est clairement ce qui fait leur succĂšs d’aprĂšs moi, elles sont fluides, agrĂ©ables, se mĂ©langent bien, donnent de beaux effets. J’ai profitĂ© de l’Ă©tape de la sous-couche pour essayer de beaucoup les diluer afin de voir si elles tolĂ©raient bien d’ĂȘtre utilisĂ©es comme de l’aquarelle. J’ai notĂ© un excellent rendu, probablement meilleur que les Linel qui ont vite tendance Ă donner des rendus hĂ©tĂ©rogĂšnes quand on leur ajoute trop d’eau.


Pour ce qui est des superpositions, là encore tout se passe trÚs bien, la texture est facile à contrÎler, le rendu est homogÚne, les aplats et dégradés se font remarquablement bien.
Je n’ai cependant pas testĂ© la gouache mise en godets pour le moment, la mention « Gouache will dry out, crack and may fall from the palette » (la gouache peut sĂ©cher, craqueler et se dĂ©tacher de la palette) prĂ©sente sur chaque tube ne m’inspire pas trop confiance. En cherchant sur internet, j’ai trouvĂ© quelques conversations Reddit dans lesquelles on mentionne la possibilitĂ© de lui mĂ©langer un peu de glycĂ©rine pour amĂ©liorer sa rĂ©hydratation. Peut-ĂȘtre que je testerai un jour histoire d’ĂȘtre fixĂ©e.

Conclusion : Mon avis sur les gouaches Holbein
Pour moi, ces gouaches sont absolument idéales si vous souhaitez réaliser des oeuvres dans le but de les numériser. Leur capacité à faire de beaux aplats, leurs couleurs éclatantes, leurs contrastes profonds ont tout pour satisfaire aussi bien les illustrateurs que les peintres réalistes ou de tous styles.
En revanche, si l’objectif est de vendre les peintures originales, je vous recommande d’ĂȘtre extrĂȘmement vigilant sur le choix de vos couleurs. Le plus sĂ»r restera d’acheter vos tubes Ă l’unitĂ©, en vous assurant que chacun prĂ©sente une bonne rĂ©sistance Ă la lumiĂšre.

N’hĂ©sitez pas Ă partager votre avis sur ces peintures si vous les avez dĂ©jĂ utilisĂ©es !
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